Ciayter - Les origines

  Cette histoire s'est déroulée il y a de cela presque sept siècles et est l'une de nos plus célèbres légendes familiales.
 L'on dit que Fiacre Ciayter fut l'un des plus puissants combattants de Lordaeron, malgré tout issu de paysans ignares. Il vivait dans un petit bourg, plus à l'ouest et faisait office de forgeron, faute de pouvoir rejoindre la milice locale, étant le quatrième fils de son père.
 Il se trouve que cette petite baronnie était régie par une famille de la noblesse Lordaeronnaise représentée par un père et sa fille, dotée d'une si grande beauté qu'aucun homme n'était autorisé ne serait-ce qu'à l'entrevoir.

  Un beau jour, alors que les vergers fleurissaient et que le forgeron recevait la visite quotidienne de ses trois frères aînés, une nouvelle se répandit dans le village. Un jeune homme au physique iréel s'était rendu jusqu'à la demeure du Baron afin de faire sien sa fille. Comme de juste, le régent lança une annonce aux villageois : L'étranger s'étant emparé de la chair de sa chair, celui qui parviendrait à libérer la belle obtiendrait sa bénédiction.

  Les trois frères, vaillants combattants munis d'armes fraîchement forgées répondirent à l'appel et rejoignirent les montagnes successivement.
Le premier revint bredouille.
Le second se replia avant de succomber à ses blessures.
Le troisième ne donna plus signe de vie.

  Tous ignoraient se qu'ils s'étaient engagés à combattre et l'imaginer simplement les terrorisait.
Fiacre n'était pas réellement intéressé par cette donzelle mais l'idée d'abandonner là son frère à son sort le dégoûtait.
Equipé de sa dernière création, une simple lame bâtarde, le forgeron se rendit à son tour dans les monts, marchant de longues heures dans le froid des hautes cimes.

  Alors qu'à chaque pas l'espoir semblait s'évanouir, il croisa sur sa route une fine lame courbe qu'il avait lui-même forgée quelques jours plus tôt pour le plus âgé de ses frères.
   Ainsi, il ne tarda pas à retrouvé le corps lacéré de celui-ci, baignant alors dans son sang. Il était arrivé trop tard.
Perché sur un pic, ses cheveux argentés poussés par la brise, le coupable était doté d'une réelle splendeur. Une innocence telle que l'imaginer se prêter à un tel carnage était tout bonnement invraisemblable. C'est donc perplexe que Fiacre lui permit de prendre la parole.

« Vous vous ressemblez », lui lança-t-il d'un ton doucereux. « Serais-tu le frère de ces deux individus ? L'autre était d'une faiblesse affligeante, mais celui-ci s'est bien battu, honore le, je t'autorise d'ailleurs à emporter sa dépouille. »

 Mais Fiacre dégaina, prêt à perdre la vie face à un danger dont il ne décelait pas la source, déterminé à l'idée de venger son frère. Le jeune homme, tout sauf menaçant bailla l'espace d'un instant.

« Ce combat m'a épuisé, je ne tiens pas à te tuer, souhaites-tu malgré tout continuer cette folie ? »

  Le forgeron ne broncha pas jusqu'à ce que l'assassin, esquissant un léger sourire se décide à prendre sa véritable forme. Un dragon aux écailles argentées et au regard d'acier. Des griffes de la taille d'un bras et des crocs déchirant même le roc. La lutte était clairement inégale, perdue d'avance. Mais malgré cela, Fiacre ne perdit pas espoir. La créature le dominait par la taille, mais deux combats acharnés l'avaient considérablement affaiblie.
  Passant habilement au travers des coups de patte du reptile, il aperçu brièvement une faille dans sa défense, les écailles du cou endommagées par les lames familiales étaient selon lui une faiblesse à exploiter.
  L'humain astucieux, sans hésitation, contourna la créature pour, en un geste, abattre son adversaire. Celui-ci parvint quelques instants à articuler de sa voix caverneuse avant de s'écrouler, la nuque nettement entamée.

« Je te maudis, toi et ta famille. Tu te marieras avec cette fille, oui, mais vous mourrez jeunes. Tu auras deux fils, le premier héritera de tes terres mais succombera sous la lame du cadet qui vivra dans une solitude éternelle. »

  Libérant la sublime captive, sans doute destinée à rejoindre le repas du prédateur mortel, il resta cependant là, contemplant son œuvre. L'on dit alors qu'une voix intérieure le poussa à ôter son armure afin de se baigner dans le sang du terrible reptile. C'est ainsi que ses cheveux et ses yeux prirent cette teinte argentée faisant plus tard la fierté des Ciayter.
   C'est avec la tête du dragon qu'il retourna au village, adulé malgré son apparence dénaturée. Fiacre se maria alors avec la fille du Baron et eut en effet deux fils. Ses exploits résonnèrent dans tout Lordaeron. Fait Vicomte, il choisit pour emblème familial le dragon argenté à l'origine de sa célébrité.